L’appropriation du pouvoir à travers une contribution socio-politique

Par Marie-Thérèse Toutant, conseillère en défense des droits

 

Actuellement, partout autour de nous circule régulièrement le terme « appropriation du pouvoir ». Mais qu’en est-il au juste de ce concept dans la pratique? Pour ma part, j’entretiens depuis toujours la conviction profonde de l’importance de soutenir l’appropriation du pouvoir des personnes directement concernées par un savoir expérientiel lié à la santé mentale, la pauvreté et/ou l’exclusion.

À mon avis, c’est au sein du milieu communautaire que nous devrions le mieux saisir l’importance des leviers permettant aux citoyens de s’approprier leur pouvoir. Il est indéniable que nous devons reconnaitre leur savoir expérientiel, et ce, au même titre que tout autre savoir. Cette connaissance unique apporte des notions complémentaires à la formation académique reçue par plusieurs des intervenants oeuvrant dans nos organisations.

Évidemment, depuis une trentaine d’années, des avancées en la matière se sont réalisées dans plusieurs organismes communautaires du Québec. Toutefois, soyons réalistes: « il y a loin de la coupe aux lèvres »! Nous pouvons présentement très bien constater qu’il manque des joueurs au sein de nos équipes de travail et que ces personnes devraient se retrouver parmi nos collègues, et ce, à tous les niveaux de notre hiérarchie organisationnelle. Comment croire que la société peut nous faciliter l’accès au travail alors que le milieu même de la santé mentale, qui nous incite à y croire, nous ferme sa porte? Il faut se souvenir que la mission du communautaire est née du militantisme de citoyens voulant se sortir d’un contexte d’oppression.

Présentement, en fréquentant les tables de concertation lavalloises ou d’autres lieux décisionnels et mobilisateurs, on a vraiment l’impression que nous avons perdu de vue la raison première de notre présence auprès de la communauté fragilisée par un système socio-politique qui est axé essentiellement sur la production.

Le savoir expérientiel provenant de l’exclusion citoyenne devrait être utilisé à travers nos rencontres d’organisation sociale. Ce sont les personnes détenant ce précieux savoir qui connaissent le mieux les besoins et les intérêts de leurs pairs. Ils représentent une mine d’or d’idées et de créativité pour enrayer la pauvreté et la stigmatisation entourant leur réalité.

Par ailleurs, puisque chaque être humain chemine mieux quand il est reconnu à part entière en tant que citoyen, il est urgent de pratiquer la reconnaissance du potentiel des gens trop souvent invisibles lors de nos débats collectifs. Il apparait donc indéniable que nous devrions susciter un élan dans le processus de démocratisation de nos instances administratives et décisionnelles.

Finalement, nous ne pouvons passer sous silence qu’une faible estime de soi découlant d’une stigmatisation collective requiert une restructuration globale de l’être par le biais, entre autres, d’une participation citoyenne active. Or, étant donné que le milieu de prédilection pour fournir des leviers à ces citoyens exclus voulant prendre part à la transformation sociale demeure le milieu communautaire, il est de mise que nous réaffirmions solidairement notre spécificité en nous appuyant sur la force tranquille de ceux et celles qui nous ont donné naissance!