Sur l’appropriation du pouvoir

par Gary Stevenson, membre

D’abord que veut dire ce mot ? Parle-t-on de réappropriation du pouvoir sur soi ou sur les institutions ? Si on parle de réappropriation du pouvoir sur soi on parle alors de trouver des façons de se sentir bien. Mais connaissez-vous quelqu’un qui ne veut pas être bien ? Peut-on postuler que cette expression comporte sa part de mépris ? À moins qu’il y en aurait parmi nous qui font preuve de tendances autodestructrices ? Faire des psychoses en serait- ce ? Prendre de la drogue ? Mais forcer quelqu’un à suivre un traitement irait-il l’encontre de cette réappropriation ? Après tout, la psychiatrie est un ennemi qui veut nous droguer de force pour nous ôter notre liberté. C’est ce que la vaste majorité des groupes qui défendent les psychiatrisés s’entendent à dire. Mais qui parmi nos vaillants défenseurs des  »gens normaux  », représentants de ses groupes pour la plupart, a déjà fait une psychose pour pouvoir en parler ? Bien sûr que nous, les psychiatrisés, avons notre mot à dire. Encore que ce ne sont pas ces groupes qui endurent nos psychoses, que ce soit les  »gens normaux » qui y travaillent ou les psychiatrisé.e.s qui les fréquentent, car il suffit de se sentir  »mal » pour en être vite exclu.

Alors là, il arrivera qu’on foutra à la porte comme un chien quelqu’un qui ne s’appartient plus (qui ne peut se réapproprier son pouvoir sur soi, dira-t-on) afin que l’on s’assoit autour d’une table pour boire du café et manger des beignes et parler de combien la psychiatrie est liberticide, car c’est de ça qu’il s’agit. Alors asseyons-nous autour de cette table et parlons de réappropriation du pouvoir sur les institutions, parlons de militantisme. Que demandera-t-on ? Des soins pour ceux qui en ont besoin et à qui on n’en donne pas et qui finisse par tuer des membres de leur famille ? L’abolition de la P-38 qui permet à des intervenants d’utiliser une contention sur quelqu’un d’agité ? Demandera-t-on à la magistrature de nous juger sur nos actions coupables ou non et en finir avec des acquittements pour cause de folie qui sont en réalité des peines à vie ? Ou une nouvelle politique qui visera à aider quelqu’un tombé en psychose pendant quelques mois au lieu d’attendre qu’il démontre des signes de dangerosité imminente, qui veut dire quoi au juste ? Quand tu auras fait une tentative de suicide ou menacé tes parents on t’aidera peut-être ? À moins que tu ne les tues et qu’on t’enferme pour de bon ?